On se souvient que l’article 66 de la loi de financement de la sécurité sociale (« LFSS ») pour 2019 avait notamment modifié l’article L. 5125-23 du code de la santé publique (« CSP ») pour limiter les cas dans lesquels la substitution par un médicament générique peut être exclue par le prescripteur.
Les situations médicales dans lesquelles cette exclusion est permise ont été définies par un arrêté du 12 novembre 2019 publié au Journal officiel le 19 novembre 2019. Pour mémoire, il s’agit de :
- la prescription de médicaments à marge thérapeutique étroite pour assurer la stabilité de la dispensation, lorsque les patients sont effectivement stabilisés avec un médicament, et à l’exclusion des phases d’adaptation du traitement (MTE). L’arrêté liste les 13 principes actifs qui peuvent relever de cette situation médicale ;
- la prescription chez l’enfant de moins de six ans, lorsqu’aucun médicament générique n’a une forme galénique adaptée (EFG) ;
- la prescription pour un patient présentant une contre-indication formelle et démontrée à un excipient à effet notoire présent dans tous les médicaments génériques disponibles (CIF).
Notons qu’il s’agit là d’une possibilité et non d’une obligation pour le prescripteur.
L’article L. 5125-23 du CSP a de nouveau été modifié par l’article 42 LFSS pour 2020 de sorte à autoriser le pharmacien, lorsque le prescripteur n’a pas fait usage de cette possibilité, à exclure la substitution dans certaines situations médicales.
Cette mesure résulte d’un amendement déposé par le gouvernement dans le but d’assurer la stabilité de la dispensation des MTE. Pour mémoire, il s’agit de médicaments pour lesquels les concentrations toxiques sont proches des concentrations efficaces. De ce fait, les faibles variations de dose ou de concentration induites par le passage d’un princeps à un générique peuvent entraîner une modification du rapport bénéfices/risques.
L’article 42 de la LFSS renvoyait à l’arrêté définissant les situations médicales dans lesquelles le prescripteur peut exclure la substitution (l’arrêté du 12 novembre 2019) le soin de préciser également les situations médicales dans lesquelles l’exclusion de substitution peut être justifiée par le pharmacien ainsi que, le cas échéant, les modalités de présentation de cette justification par le pharmacien et d’information du prescripteur.
L’arrêté du 12 novembre 2019 a donc été modifié par un arrêté du 30 janvier, publié au Journal officiel le 6 février et qui est entré en vigueur le 7 février 2020.
Quelles sont les situations médicales dans lesquelles le pharmacien peut exclure la substitution ?
Le pharmacien ne peut exclure la substitution, lorsque le prescripteur ne l’a pas fait, que dans le cadre de la prescription de médicaments à MTE pour assurer la stabilité de la dispensation, lorsque les patients sont effectivement stabilisés avec un médicament, et à l’exclusion des phases d’adaptation du traitement.
Cette exclusion de substitution n’est permise, à l’instar de celle qui existe pour les prescripteurs, que pour les 13 principes actifs suivants : lamotrigine, pregabaline, zonisomide, lévétiracétam, topiramate, valproate de sodium, lévothyroxine, mycophénolate mofétil, buprénorphine, azathioprine, ciclosporine, évérolimus, mycophénolate sodique.
Ces nouvelles dispositions sont critiquables à plus d’un titre :
- lorsque, en phase d’adaptation, le prescripteur recherche la dose et la concentration correspondant à un patient donné, ni lui ni le pharmacien n’ont la possibilité d’exclure la substitution. Le patient risque donc de se voir délivrer un médicament générique présentant moins de bénéfices et plus de risques que le princeps ;
- l’exclusion de substitution n’est possible que pour les 13 principes actifs listés supra. Or, de nombreux acteurs considèrent que cette liste, qui n’a fait l’objet d’aucune concertation, n’est pas exhaustive ;
- enfin, contrairement au prescripteur, le pharmacien n’a pas la possibilité d’exclure la substitution ni chez l’enfant de moins de six ans lorsqu’aucun médicament générique n’a une forme galénique adaptée ni pour un patient présentant une contre-indication formelle et démontrée à un excipient à effet notoire présent dans tous les médicaments génériques disponibles…
Quelles sont les modalités de présentation de cette justification et d’information du prescripteur ?
Lorsque le pharmacien exclut la substitution, il en fait mention, sous forme manuscrite, le cas échéant pour chaque médicament prescrit, en apposant la mention suivante sur l’ordonnance « non substituable (MTE-PH) ».
L’arrêté précise que le pharmacien doit également en informer le prescripteur mais aucun formalisme particulier n’est imposé.