L’article 54 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 a mis en œuvre des expérimentations de télésurveillance pour une durée de 4 ans, soit jusqu’au 31 décembre 2021. La télésurveillance a ainsi pu être prise en charge par l’assurance maladie dans cinq pathologies chroniques.
L’article 24 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (« PLFSS ») pour 2022 prévoit l’entrée dans le droit commun de la prise en charge de la télésurveillance par l’assurance maladie. Il a été adopté par le Sénat le 9 novembre, avec quelques amendements portant principalement sur le traitement et le partage des données.
Un décret précisera la date d’entrée en vigueur de ce nouveau régime, qui est fixée au plus tard le 1er juillet 2022.
Quelles activités de télésurveillance seront éligibles au remboursement?
Sont visées par l’article 24 du PLFSS pour 2022 les interventions qui mêlent de manière indissociable une surveillance médicale et l’utilisation de dispositifs médicaux numériques :
- La surveillance médicale a pour objet l’analyse des données et alertes transmises au moyen des dispositifs médicaux numériques ainsi que toutes les actions nécessaires à sa mise en place, au paramétrage du dispositif, à la formation du patient à son utilisation, et à la vérification et au filtrage, ainsi, le cas échéant, que des activités complémentaires, notamment d’accompagnement thérapeutique. Seules les activités de surveillance médicale réalisées par un opérateur de télésurveillance déclaré auprès de l’ARS sont exigibles à une prise en charge de droit commun.
- Les dispositifs médicaux visés sont les dispositifs numériques de télésurveillance sont des logiciels revêtus du marquage CE, ayant pour fonction de collecter, analyser et transmettre des données physiologiques, cliniques ou psychologiques et d’émettre des alertes lorsque certaines de ces données dépassent des seuils prédéfinis et, le cas échéant, les accessoires de collecte associés.
Les dispositifs médicaux numériques utilisés dans le cadre de l’activité de télésurveillance prise en charge devront être mis à la disposition de l’assuré par l’opérateur de télésurveillance (en tant qu’exploitant ou par l’intermédiaire d’un exploitant ou distributeur au détail en cas de convention).
Quelles seront les modalités de prise en charge des activités de télésurveillance?
Inscription sur la liste « télésurveillance »
Comme pour les dispositifs médicaux, la prise en charge des activités de télésurveillance est subordonnée à leur inscription sur une liste « télésurveillance » (distincte des listes existantes), décidée après avis de la CNEDiMTS[1].
L’inscription des activités de télésurveillance sur cette nouvelle liste est effectuée sous la forme d’un référentiel. Un système de radiation progressive des référentiels de télésurveillance qui apportent un progrès moindre pour le patient est mis en place. Ce système permet une gestion dynamique de la liste des solutions de télésurveillance prises en charge par l’assurance maladie.
L’inscription sur cette liste n’est pas automatique et peut être subordonnée au respect de spécifications techniques et au dépôt d’une déclaration de conformité aux référentiels d’interopérabilité et de sécurité par les exploitants du dispositif médical pour garantir la sécurité des données de santé.
Articulation avec la LPPR
Les dispositifs médicaux de télésurveillance inscrits sur la LPPR seront radiés de cette liste au plus tard au 1er janvier 2023.
Toutefois, il restera possible d’inscrire un dispositif médical simultanément sur la liste des produits et des prestations remboursables, pour ses fonctions qui ne sont pas liées à la télésurveillance, et, sur la liste de télésurveillance, pour sa fonction de télésurveillance.
Remboursement sur la base d’un forfait
L’article 24 du PLFSS pour 2022 prévoit que les activités de télésurveillance sont prises en charge par le biais d’un forfait pour des durées prédéterminées.
En pratique, ce forfait comprend une base forfaitaire déterminée en fonction des moyens humains nécessaires à la surveillance médicale et des caractéristiques des dispositifs, et une modulation à la hausse ou à la baisse en fonction de certains critères (telles que la fréquence du suivi réalisé par l’opérateur de télésurveillance, la complexité de la prise en charge, le recours à des accessoires de collecte associés etc.). Le Sénat a introduit un amendement précisant que cette base forfaitaire peut dissocier un forfait rémunérant le professionnel de santé et un forfait rémunérant l’exploitant ou le distributeur du dispositif médical numérique.
Ces forfaits ainsi que d’autres éléments doivent être fixés et précisés par voie réglementaire.
Il est à noter que le patient ne sera redevable à un opérateur de télésurveillance que du montant prévu par le forfait (pris en charge à 100%).
Possibilité de plafonner le prix des dispositifs médicaux
Enfin, l’article 24 PLFSS pour 2022 permet aux ministres de plafonner les prix des dispositifs médicaux numériques de télésurveillance et des dispositifs de collecte associés. Les ministres ont dans ce cas l’obligation de tenir compte de l’évolution des charges, des revenus et du volume d’activité des industriels concernés.
Les modifications apportées par le Sénat en matière de données
L’article 24 du PLFSS a été modifié par le Sénat et prévoit désormais, à l’instar de l’article 33 du PLFSS pour 2022 relatif aux dispositifs innovants, que les dispositifs médicaux numériques de télésurveillance doivent permettre d’exporter les données traitées dans des formats interopérables appropriés et comporter, le cas échéant, des interfaces permettant l’échange de données avec des dispositifs ou accessoires de collecte des paramètres vitaux du patient.
Par ailleurs, le Sénat a précisé que, en cas de refus du patient à la transmission des données nécessaires au contrôle de l’utilisation effective du dispositif médical numérique, l’activité de télésurveillance ne pourra être prise en charge. Si la prise en charge est déjà engagée, elle sera suspendue. Son niveau pourra être modulé en cas d’inutilisation répétée du dispositif.
[1] Notons qu’un passage en CNEDiMTS sera obligatoire, que le dispositif médical soit inscrit en nom de marque ou en description générique.