Absente de l’avant-scène jusqu’au 17 mars, date à laquelle le Conseil européen[1] délibérant en visioconférence a donné son accord à la proposition de la Commission présentée la veille de fermer immédiatement et pour un mois renouvelable l’espace Schengen, la Commission européenne multiplie depuis cette date les initiatives destinées à aider les États membres à gérer au mieux la crise sanitaire, économique, sociale et financière provoquée par la pandémie qui frappe actuellement toute l’Union.

Vers la constitution d’une réserve stratégique européenne

Dans ce cadre, la proposition de budget rectificatif au budget de l’Union présentée par la Commission le 2 avril vise notamment à allouer 300 millions d’euros supplémentaires au fonds de réserve de matériel médical rescUE, d’ores et déjà doté de 80 millions d’euros.

Créée en mars 2019, rescUE est une réserve stratégique dont l’action a été pour l’heure cantonnée par la Commission à la lutte contre les feux de forêts. Une décision de la Commission du 19 mars 2020 étend son champ d’intervention pour constituer des stocks de respirateurs, de masques et de traitements. Convaincue que la solidarité est la seule réponse possible à la pandémie actuelle, la Commission veut doter l’Union d’un fonds de réserve stratégique qui comprendra des appareils respiratoires, des masques, des traitements, des vaccins ou encore du petit matériel de laboratoire et sera destiné à aider les Etats membres face à la pénurie de matériels. Dotée de 80 millions d’euros, la réserve sera située sur le territoire d’un ou de plusieurs Etats membres qui restent à déterminer. Cet ou ces Etats gestionnaires supporteront 10 % des coûts de fonctionnement de la réserve, les 90 % restants seront pris en charge par la Commission. La réserve sera gérée par le Centre de coordination de la réaction d’urgence (ERCC), en charge de la protection civile au niveau européen[2], qui acheminera les matériels selon les besoins et les demandes des Etats. La réserve stratégique doit être en capacité d’intervenir dans les 12 heures de l’acceptation de l’offre par l’Etat membre qui prendra le matériel en crédit-bail, selon un tarif déterminé par référence au prix de marché.

Pour donner suite le plus rapidement possible à cette initiative, la Commission a d’ores et déjà lancé quatre procédures de passation conjointe de marchés publics[3] pour des équipements de protection individuelle (EPI) :

  • un appel d’offres pour des masques, le 28 février ;
  • un appel d’offres concernant les masques, les gants, les lunettes de protection et les écrans faciaux, les masques chirurgicaux et les combinaisons, le 17 mars ; 
  • un appel d’offres concernant des respirateurs, le 17 mars ;
  • un appel d’offres pour des kits de dépistage, le 17 mars.

Vers un élargissement des attributions du fonds d’urgence européen aux urgences sanitaires

Par ailleurs, une proposition de la Commission vise à élargir le périmètre d’intervention du fonds de solidarité de l’UE (FSUE) aux urgences sanitaires. Elle a été approuvée par le COREPER (représentant les Etats membres) le 19 mars.

Le FSUE a été créé en 2002 sur pression de l’Allemagne qui, avec une grande partie de l’Europe centrale, avait subi d’importantes inondations. Son périmètre d’intervention était jusqu’alors limité aux catastrophes d’origine naturelle. La proposition actuellement en cours d’approbation vise à élargir son périmètre d’intervention aux urgences sanitaires. Pour ce faire, la proposition de budget rectificatif soumise par la Commission propose d’allouer au fonds d’urgence une dotation supplémentaire de 2,7 milliards d’euros au titre de l’année 2020.


[1] Réunion des chefs d’Etat et de Gouvernement, le Conseil européen ne doit pas être confondu avec le Conseil, qui réunit les ministres du secteur concerné par les questions à l’ordre du jour (exemple : Conseil santé).

[2] Décision n° 1313/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relative au mécanisme de protection civile de l’Union (JOUE L 317 20 décembre 2013), modifiée par la décision n° 420/2019/UE du 13 mars 2019. C’est cette décision de 2013, modifiée en 2019, qui a permis, à partir de janvier, le rapatriement d’européens de Chine et la fourniture à la Chine de 56 tonnes d’équipements de protection individuelle (dont 20 tonnes par la France).

[3] La procédure de passation conjointe des marchés publics entre l’Union et les Etats membres est prévue à l’article 5 de la décision n° 1082/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 relative aux menaces transfrontalières graves sur la santé et abrogeant la décision n° 2119/98/CE (JOUE L 293 5 novembre 2013). L’adhésion d’un Etat membre à la procédure est matérialisée par la signature d’un accord. Actuellement, 25 Etats membres participent à l’accord.

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